16 janv. 2007

ETAPE 08 Bord du lac

En Russie les voitures fument comme si elles étaient en feu. Derrière chaque voiture qui roule il y a une volute de fumée blanche qui la suit. Effet combiné de la condensation de l’eau de la combustion et mauvaise combustion, le tout pris dans les turbulences de l’air du a un aérodynamisme bien pensé des 4x4 ou autres modèles russes. Le résultat est comique, ça donne l’impression qu’ils ont des voitures à vapeur.

Ça c’est ce qu’on peut voir du trottoir ou quand le train longe une route. Sur le trottoir aussi il se passe des choses. Il y a aussi les gens. Ils ne parlent que très peu anglais mais de temps en temps une personne s’approche de vous et vous demande dans un anglais scolaire, si vous aller bien ou quel est votre nom, ils vous aident à trouver votre chemin. Parfois un petit vieux vous aborde en allemand et vous invite à boire du thé et du schnaps chez lui.

Ce matin sur le chemin de la gare le thermomètre indique -26°C, record battu. On croise sur le chemin d’autres personnes qui se rendent à la gare, dont notamment une grande russe, blonde, portant à bout de bras de gros sacs plastiques qui lui coupent la circulation des doigts. Comment je sais ? Parce que cette russe, elle est pas pareil que nous, par -26°C elle ne porte pas de gants, juste des sacs plastiques lourds !

On se réfugie dans la gare et on attend notre train au chaud. D’un coup, une armée d’asiatique se rue vers l’escalier qui monte, se poussant les uns les autres, jouant des coudes voir s’aidant de leurs bagages. On comprend que la voix nasillarde qui suivait le jingle de noël vient d’indiquer le quai du train et on comprend du même cou, que tous ces asiatiques bardés de caisses en carton et de sacs de jutes prennent le même train que nous. Donc on se met dans le mouvement, poussé de derrière dans l’escalier qui monte, je comprend quand on parle de marché porteur.

Nous voilà installé à la place 1 et 2 du wagon 19 avant avant dernier wagon du train. C’est un autre type de train, une classe en dessous. Là ou dans l’autre il y avait 4 couchettes, ici il y en à 6. Comment ? C’est simple il n’y pas de cloison pour une couloir. Ce qui fait que chaque wagon est un peu un grand dortoir. Mais nous on ne fera que 8h de train en journée. On s’arrête ce soir à Irkutsk. On a pris ce train de jour car il longe le la baïkal. Et on ne va pas être déçu du programme.

Ce lac est le plus grand réservoir d’eau douce du monde, plus grand que les 5 grands lacs américains réunis. Comment c’est possible ? Simplement parce qu’il est profond, très profond, 1,6km de profondeur. Il s’est formé à la jonction de deux plaques tectoniques qui continue à bouger et à s’écarter et qui sait un jour fera une mer séparant l’Asie en deux. Mais pour l’instant il est juste un très très grand lac, très très profond. L’eau y est des plus claire, on peu voir ses pieds à 40m de fond, pour autant qu’on ait les jambes assez longues.

Le lac n’est pas encore gelé, il le sera complètement dans un mois. Là, notre train suit ses côtes assidûment, comme si les ingénieurs avaient voulu faire passer la voie ferrée le plus près possible de l’eau, et c’est beau. Les vagues viennent se briser sur des bords glacés, formant sur chaque pierre une petite calotte de glace d’où pendent de longs stalactites. En face à une distance impossible à estimer s’élèvent des montages couvertes de neige. Elles tracent une fine ligne noire irrégulière séparant le bleu sombre du lac du bleu pâle d’un ciel d’hivers.

Il y a bien plus à dire sur ce chemin de fer, combien il a été difficile à construite, pourquoi et comment il a été fait. C’est une histoire passionnante, héroïque, qui remise au placard bien des fictions, mais ce n’est pas mon histoire…

Depuis le début du voyage la voie ferrée est ponctuée de petits hommes orange. Travaillant sur la voie, les ouvriers sont affublés d’un gilet orange fluo de sécurité. Il y en a tout le long et exécutant les tâches les plus diverses. Certains, punis, sont obligés de balayer la neige, on les trouvent au milieu de nulle part un ballait à la main. Je sais pas où ils ont commencé, ni où ils vont s’arrêter, mais ils frottent poussant la neige qui est sur la rail, à côté du rail. D’autres sont chargés de planter des piquets, à la main dans une terre gelée, ils creusent. Et puis parfois un grand feu brûle, autour de cette flamme vive, un petit groupe d’orange semblent vouloir redonner plus de couleur à leur gilet.

On s’arrête dans une gare, sisi je vous jure… Et sur le quai, fini les beignets de pomme de terre. Devinez ce qu’on trouve, ben oui du poisson fumé, (je rappelle on est au bord d’un lac). Moi le poisson fumé c’est pas mon truc, mais je suis sur que mon père aimerait ça. Il sont tout jaune (les poissons pas la asiatique), ont l’air tout mort et alors ils sentent bon le poisson fumé. D’ailleurs une marchande passe dans le wagon et je soupçonne un passager ou deux d’en avoir acheté. L’odeur nous accompagne donc pur la fin du trajet, ça met dans l’ambiance. Si les femmes vendent les poissons, les mecs doivent le pêcher. Et sur le bord de l’eau, on voit des pêcheurs debout derrière une canne à pèche. Banal me direz-vous. Allez y un peu vous, par -20 je ne sais combien, vous mettre debout face à l’eau les pieds dans la glace histoire d’accrocher un poisson ! Moi je comprend qu’ils boivent de la vodka.

Le lac c’est beau, mais la petite elle ne saisit pas encore toute la puissance de cette eau bleue sombre, alors elle dit arreuuu… et on s’occupe d’elle. Assise sur nos genoux, elle fait de grands sourires. Un bon russe, je dis un bon russe comme ça vous le voyez un peu costau les traits pas très fins et le pas asser lourd. Un bon russe donc, tombe sous le charme, et lui rend son sourire, exhibant ainsi deux dents en or. Voir un gars comme ça faire du bruit avec sa langue pour amusé la petite, ça vous change votre point du vue sur lui, marrant non ?


Les dents en or sont relativement fréquentes ici, on aime ou on aime pas. Mais ça donne de ces gueules au mec qu’on se replonge dans les bons filme de méchant russe.

On a ainsi suivit le lac pendant 200km, de tout près comme si on pouvait toucher l’eau.

J’avais déjà été impressionné en allant en Slovénie, qu’on suive le lac Balaton pendant plus de 70km, mais alors ici…

Dans le désordre, on a encore vu, des brises lames de bétons couvert de glace, de petites embarcations à rames avec des pécheurs ramant dans l’immensité, la même chose sur un petit bateau pneumatique gonflable (ceux là ils avaient bu trop de vodka c’est pas possible autrement), des voies de chemin de fer qui semblent s’arrêter au milieu de l’eau comme si on avait poser des rails sur le pier de nieuwport, de petites maisons qui fument, des tunnels, le bout du train avec sa locomotive rouge qui nous tire (ça c’est quand le train suit la courbe d’une petite crique), une responsable de wagon charmante, une autre qui me coure derrière dans le wagon parce que je n’ai pas fermé la porte des chiottes (moi je l’avait laissé comme je l’avais trouver, aussi non mais !).

La nuit tombe je vais refroidir le biberon trop chaud entre les deux wagons, la petite mange, s’endort dans sa combi de ski rose, on arrive à Irkutsk. Là on prend la boite de conserve à roulette et on se pause dans un hôtel chauffé avec douche. On se lave les cheveux, parce que puer en dessous des bras ça se voit pas, mais nos cheveux gras, on n’en peu plus ! On donne un coup de fil à jack qu’on rencontrera demain…